vendredi 20 novembre 2009

Coexistance

Et cette première année que nous passâmes à Tunis elle collectionna les rhumes, les angines et les grippes .Je demandais à mes parents qu'ils cessent de parler patois devant Marie; c'est peut-être dans ces moments où ils se mettaient à parler entre eux , tous à la fois pour se faire entendre, que la solitude de ma femme, au sourire figé, celui d'une sourde, me frappait le plus. Mais je n'insistai pas beaucoup , je l'avoue; ma mère comprenait à peine le français,fallait-il l'exclure de la conversation pour que Marie se sentit moins perdue?
Raisonneur, tantôt sincère, tantôt de mauvaise foi, j'essayai d'expliquer à Marie ce qui la heurtait, espérant le lui rendre un peu familier. Les portes ne ferment pas? Négligence certes, mais aussi la chaleur dessèche le bois, la pluie subite le regonfle; la nourriture trop épicée? Sans épices, avec ce climat,on ne mangerait plus. Je reconnaissais souvent, en moi-même qu'elle avait raison mais il m'était désagréable de l'avouer, j'aurais admis alors, que jusqu'ici, j'avais vécu en sauvage. Il s'agissait bien d'ailleurs de discours et de persuasion! Il aurait fallu transformer les gens et les institutions, les bâtiments et toute la nature. Pouvais-je empêcher les marchands de brioches de hurler sous nos fenêtres dès six heures du matin suivis par les marchands de beignets au miel, puis par les marchands d'artichauts, de vieux habits, de pétrole? Pouvais-je supprimer l'humidité, atténuer la chaleur, faire pousser la verdure?....
à suivre
Albert MEMMI
AGAR,1955

1 commentaire:

manou a dit…

Bonjour,
Je suis une nouvelle admiratrisse de vos blogs! je sait pas si vous avez reçu un commentaire signé Manou posté hier ou avant hier!!
j'attend de vous une réponse je sait pas exactement ou je peut trouvé votre réponse, mais ne vous inquiété pas ata enbarbeche hatta nalka, kima barbachet et j'ai pu vous ecrire
Aller, à bientôt!!!